L'enseignement des « questions vives » : lien vivant, lien vital, entre école et société ?

Voir la ressource
Publié le 27 mai 2007
Description


Jusqu'encore récemment, la plupart des disciplines scolaires étaient données à enseigner sur un modèle positiviste, transmettant des « vérités objectives » sur l'organisation passée et actuelle du monde naturel, de la société et de ses produits. Autant de représentations auxquelles il convenait de faire adhérer les élèves, au nom de la culture commune républicaine. D'où une volontaire neutralité, du moins en apparence, dans l'exposition des savoirs, écartant controverses, interprétations plurielles et débats.
Ce modèle s'est illustré avec succès au cours du XXe siècle, dont il a accompagné le spectaculaire développement dans le domaine des sciences et des techniques. Sans doute aussi a-t-il atteint ses limites et n'est-il plus adapté au monde et aux besoins de notre XXIe siècle. Car les questions du monde actuel bousculent ce qui pouvait apparaître comme un consensus académique stable.
Chômage, mondialisation, choix énergétiques, changement climatique, manipulations génétiques du vivant... autant de domaines porteurs de questions vives qui se posent à la communauté des humains et qui engagent des choix de société décisifs pour la génération présente et pour celles à venir. L'école ne peut rester étrangère à de telles questions. Elle se doit au contraire de préparer tous les élèves à les affronter. Il s'agit donc de construire les compétences qui permettront aux jeunes d'appréhender correctement la complexité, sous ses multiples dimensions, de se confronter à des savoirs émergents, non encore finalisés, instables, laissant place aux incertitudes. Il convient également d'entraîner les élèves à développer un esprit critique envers des informations et des discours contradictoires, puis à se forger eux-mêmes une opinion, personnelle mais raisonnée, soutenue par une argumentation et des valeurs éthiques valides, susceptible de s'enrichir et sujette à révision. Ainsi pourront-ils être mieux armés pour prendre part au débat citoyen et réunir les meilleures chances d'agir positivement sur le monde.
Mais affronter les questions vives de l'actualité dans l'enseignement, c'est aussi accepter de faire face aux épisodes du passé qui laissent encore les traces de blessures vives. C'est là que se posent à l'école les questions sensibles d'histoire et de mémoire : destruction des juifs en Europe, esclavage, colonisation et décolonisation, immigration... autant de sujets vifs qui suscitent des controverses dans l'espace social et que les programmes scolaires ont bien longtemps tenu à distance, par un silence pudique ou par des stratégies de contournement visant à les fractionner, les extraire de leur contexte, afin de mieux les lisser, les pacifier.
Enseigner des questions vives est en effet une entreprise à risques multiples, pour l'école elle-même, pour les enseignants mais aussi pour les élèves. Mais c'est aussi un puissant vecteur de rénovation et de progrès pour chacun des acteurs, tant sont essentiels les enjeux à la clé.
En nous appuyant sur les travaux de recherche actuels, nous proposons de mieux comprendre les particularités épistémologiques et didactiques des questions vives. Leur introduction dans le champ scolaire étant encore récente, un tour d'horizon à travers les différents champs disciplinaires nous permettra de prendre la mesure des avancées et des pratiques d'enseignement de questions vives. Autre innovation, la place croissante de la modalité du débat comme moyen d'apprentissage sera ensuite explorée. Nous pourrons finalement dégager les principaux messages que l'enseignement des questions vives renvoie au système scolaire.
Télécharger la version intégrale (version PDF)