Aujourd’hui, on est au terme d’une histoire : depuis les années 1960, on a ouvert le collège, puis le lycée, et depuis une vingtaine d’années l’enseignement supérieur. Pour François Dubet, sociologue et professeur émérite à l’université de Bordeaux, nous sortons ainsi d’une époque où le destin social commandait, alors qu’aujourd’hui on prétend d’un côté que tout est possible, mais si, dans le processus, vous faites partie des perdants, cela relève uniquement de votre responsabilité. Cette généralisation de l’accès à l’enseignement supérieur n’a donc pas résolu la question des inégalités, notamment dans l’accès aux diplômes qui conditionne considérablement l’accès à l’emploi. De ce fait, ces inégalités génèrent des frustrations et un sentiment d’injustice et d’humiliation pour celles et ceux qui ne bénéficient pas de la voix souhaitée (ou rêvée), notamment parce que la concurrence devient de plus en plus féroce pour accéder aux formations les plus prestigieuses et sélectives. Dans ce contexte, les Écoles normales supérieures, qui relèvent du modèle de l’élitisme républicain décrit par Baudelot et Establet forgé depuis la fin du XIXe siècle, cherchent à sortir d’un mode de reproduction des élites. Mais comment relever ce défi, en alliant l’exigence académique et la volonté d’ouverture sociale ?