Les inégalités n’ont jamais été aussi fortes au sein de notre système éducatif. La dernière enquête PISA met encore une fois le doigt sur le fait qu’en France, plus qu’ailleurs, la réussite scolaire est corrélée, pour ne pas dire conditionnée, à l’origine sociale des élèves. On peut même ajouter que la France, avec un taux de pauvreté infantile relativement élevé avec près de 20% des enfants entrant dans cette catégorie, se positionne au 33^e rang sur 39 dans un classement établi par l’UNICEF.

Et on ne peut que constater que ces dernières années, les politiques de lutte contre l’échec ou les difficultés scolaire prennent peu en compte cette dimension sociale et la réalité de l’exclusion et de grande pauvreté que vivent les élèves dans certains territoires. Or, comme l’écrivait Jean-Paul Delahaye en ouverture de son rapport de 2015 : « Les écarts de réussite scolaire associés aux origines sociales mettent en danger à la fois l’école publique française et notre République car, depuis l’origine, le destin de l’école publique et celui de la République sont liés. »

C’est donc bien tout un ensemble de paramètres dont il faut tenir compte lorsqu’on s’attaque aux inégalités éducatives : inégalités sociales et économiques et la question de la pauvreté des plus jeunes, ségrégation urbaine et les phénomènes d’exclusion, les discriminations et les injustices que subissent une partie des territoires et leurs habitants. Et finalement, en 1981, au moment où Alain Savary, ministre de l’Éducation nationale, signe une série de circulaires créant l’éducation prioritaire comme politique publique, celle-ci s’inscrit dans un contexte où émerge un ensemble plus large de mesures : la question de l’intégration se met en place avec une série de mesures portant sur l’accès à la citoyenneté ; le développement social des quartiers populaires va progressivement se développer jusqu’à la création en 1988 du ministère de la politique de la ville.

Nous ne ferons pas ici le bilan de ces politiques publiques, mais nous proposons, à l’occasion de la publication du numéro 159 de la revue Histoire de l’éducation, de revenir sur cette histoire de l’éducation prioritaire en France et de comprendre ses évolutions dans la durée, mais aussi les géographies qu’elle dessine et les questions de métier qu’elle soulève.

Et pour parler, nous recevons Frédérique MAUGUEN, enseignante, formatrice et responsable depuis 2018 du Centre Alain Savary de l’IFÉ qui fête également les 30 ans, et Lydie HEURDIER, historienne, docteure en sciences de l’éducation, membre du laboratoire CIRCEFT-ESCOL de l’université Paris 8, qui a coordonné ce numéro 159 de la revue Histoire de l’éducation paru il y a quelques mois.