L'établissement scolaire et la dimension locale dans l'histoire de l'enseignement
Dans l’introduction historique que les organisateurs de cette journée ont eu l’amabilité de me demander, j’ai souhaité évoquer une question que se posent les historiens de l’éducation, du moins une partie d’entre eux, et qui me semble concerner directement l’objet de cette journée et le projet même des lieux d’éducations associés : quel est le statut de l’établissement scolaire, et, plus largement, quelle place revient à la dimension locale, dans l’évolution historique de la scolarisation et des pratiques d’enseignement, et aussi dans la manière dont nous nous figurons cette évolution ?
Je commencerai mon exposé par un constat paradoxal : pendant très longtemps, jusqu’aux années 1960-70 où les analyses critiques ont commencé à l’emporter sur la célébration du passé, la monographie d’établissement a constitué de loin le genre le plus abondant de la production historique en matière d’éducation. Le déclin amorcé dans les années 60 s’est prolongé et la monographie d’établissement est depuis devenue un genre assez mineur, à la fois par la quantité des études produites, par leur ampleur et par leur statut éditorial. Or, entre-temps, à partir des années 1980 surtout, de plus en plus d’historiens de l’éducation ont reconnu l’établissement scolaire, mais aussi la ville, comme des échelons pertinents pour aborder l’histoire scolaire.
Comment se fait-il, dans ces conditions, que ce genre vénérable de la monographie d’établissement, loin de se rétablir à la faveur de cette réhabilitation, ait continué à décliner?
Tout d’abord, il nous faut interroger ce genre monographique qui a tant plu, et qui plait encore à l’occasion. Que trouve-t-on dans ces histoires d’établissements : la plupart du temps, on y voit briller les noms d’élèves fameux ou de professeurs illustres, fleurir les anecdotes et les détails pittoresques, et aussi apparaître parfois des épisodes plus graves – révoltes d’élèves, événements historiques tragiques vécus dans tel lycée ou dans telle école. Cette littérature doit son succès à un mélange de nostalgie, de familiarité – l’expérience scolaire est ici et de nos jours presque universellement partagée –, mais aussi de dépaysement quand la période est lointaine. Elle incite rarement à une relecture critique du passé scolaire.
Peut-on, à partir de ces briques que sont ces monographies à l’ancienne, construire une histoire scolaire qui dépasserait le cadre de chacun de ces établissements ?
C’est ce qu’ont pensé, dans les premières décennies de la Troisième République, les entrepreneurs de monographies républicaines des écoles centrales, ces établissements départementaux modernes et ouverts que la Convention prétendait substituer aux anciens collèges d’humanités. De leur côté, les partisans des humanités classiques et ceux de l’enseignement catholique multipliaient à la même époque les monographies de collèges sous l’Ancien Régime, tout à la gloire de l’enseignement en latin. Malgré le contexte et les lourds enjeux idéologiques qui opposaient alors les partisans de l’école de l’État à ceux de l’école de l'Église, certaines de ces monographies, rigoureuses, bien documentées, se lisent encore avec intérêt et profit.
Mais ce genre monographique a un défaut rédhibitoire. Portant sur un établissement isolé, il ne se donne pas les moyens de monter en généralité et de relier les faits observés ici à ceux observés ailleurs, ces faits du même ordre dont la comparaison systématique permettrait de séparer ce qui relève du cas particulier de ce qui compose un modèle, une règle de fonctionnement, une logique d’ordre institutionnel ou scolaire qui s’impose partout. Dans une monographie isolée, on cherche ce qui est particulier, original, mais il est difficile de distinguer ce qui l’est réellement de ce qui relève de l’ignorance du lecteur (et de l’auteur). Faute d’un cadre général, ces travaux locaux nous renseignent donc peu sur ce qui relève de réalités ou de dynamiques locales. A fortiori, ils nous en disent encore moins sur l’évolution générale, et sur la manière dont se tisse cette évolution générale à travers la diversité des cas locaux.
En fait, beaucoup de ces travaux reposent sur l’idée implicite d’une sorte de stabilité de l’univers scolaire, qui nous permettrait de comprendre directement ce qui est désigné par un vocabulaire familier, même lorsque ces mots ont changé de sens avec le temps, comme si ce monde scolaire était éternel et figé. Ils impliquent aussi, quand ils portent sur une période récente, l’idée d’une uniformité des pratiques d’enseignement ou de l’organisation scolaire, à partir du moment où ces pratiques ou cette organisation sont définis par des règlements uniques.
C’est l’idée, propre au cas français, d’une centralisation sans faille de l’institution scolaire, à laquelle renvoient encore des expressions comme « le lycée napoléonien » par lesquelles on croit généralement décrire une réalité scolaire standardisée, qui serait plus ou moins identique en tous lieux. Or, à l’époque napoléonienne, et pendant tout le XIXe siècle, les lycées sont divers, ouvertement inégaux et hiérarchisés.
En matière d’enseignement primaire, la même illusion d’une « école républicaine » plus ou moins uniforme dans ses méthodes et dans ses réalités locales occulte volontiers les tensions pédagogiques et la diversité, nécessaire et largement assumée, d’une institution primaire pilotée à l’échelle départementale et attachée à la pédagogie de la leçon de chose et de la « petite patrie » plus qu’à l’extermination des cultures et langues locales.
Cette illusion centralisatrice, beaucoup de parlementaires et de témoins y succombent lors des auditions de la Commission Ribot de 1898 et 1899, chargée d’étudier les remèdes à la crise de l’enseignement secondaire masculin, persuadés qu’ils sont que l’uniformité des lycées, et l’absence d’autonomie et de personnalité propre qui en résulte, sont les causes de leur déclin face aux « maisons d’éducation » confessionnelles.
En fait, si Hippolyte Fortoul, dès les années 1850, a proclamé que l’État, à travers ses lycées, offrait désormais aux populations de tout l’Empire la même éducation (il s’agissait alors d’un argument concurrentiel à l’égard de la concurrence privée libérée par la loi Falloux), et si la générosité de la IIIe République réduit un peu les inégalités entre les gros lycées parisiens et les petits établissements de départements ruraux, l’inégalité et la diversité restent les trait dominants du paysage scolaire, et cette inégalité et cette diversité ne sont pas sans effet sur le fonctionnement du système scolaire, y compris dans le domaine des pratiques pédagogiques.
Cette illusion centralisatrice, beaucoup d’entre nous la partagent encore. La France aurait été, sinon de toute éternité, du moins depuis Bonaparte, un pays de centralisation administrative et scolaire où tout, toujours, se décidait depuis Paris, du moins jusqu’aux lois de décentralisation des années 1980 qui ont délégué aux régions et aux départements la responsabilité de l’équipement scolaire, et aux établissements le soin de se doter de projets propres.
On est là dans l’illusion rétrospective.
Le grand moment de la centralisation scolaire en France, c’est la période qui va, grosso modo, des années 1950 au début des années 1970, et il ne se place en rien dans le prolongement du monopole en trompe-l’œil de Napoléon.
C’est un moment historique précis et assez court : celui de l’explosion scolaire d’après-guerre, choc démographique qui a porté les taux de scolarisation secondaire et supérieure à des niveaux inédits et qui a mis l’État en demeure d’organiser l’encadrement de ces masses de jeunes gens à scolariser. C’est de ce choc qu’est née la carte scolaire et une politique de quadrillage scolaire du territoire à marche forcée (le plus grand effort de construction scolaire jamais entrepris), dans laquelle la ségrégation des filières et celle des garçons et des filles ont été emportées.
Cet épisode a ancré dans les mentalités l’idée d’établissements publics qui ne seraient que les succursales d’une institution pilotée d’en haut et dont l’évolution ne dépendrait que de l’autorité supérieure, idée très forte déjà en France où la guerre scolaire entre a longtemps occulté les autres moteurs de l’évolution éducative et fait de l’Eglise et de l’Etat les uniques acteurs de cette évolution.
Or, c’est un modèle d’évolution très différent que met en lumière l’histoire de la scolarisation depuis quelques décennies, un modèle dans lequel les établissements ont un rôle central, aussi bien en matière d’organisation scolaire, de régime disciplinaire et de mode d’accueil des élèves que du point de vue des contenus et des méthodes d’enseignement.
Un des facteurs de cette évolution de l’histoire de la scolarisation et de l’enseignement réside dans la pratique relativement récente de ce que j’appelle la monographie en série, c’est-à-dire la production de répertoires systématiques de tel type d’établissements permettant de mettre en évidence leurs caractères communs et leurs différences et d’intégrer ces données à la lecture globale d’une forme d’enseignement , de ses logiques de fonctionnement, de diversification, d’évolution.
Deux chantiers pionniers sont à mentionner ici, à peu près contemporains (ils ont été entamés dans les années 1970).
Le premier est le répertoire des collèges français (XVIe-XVIIIe siècle) de Dominique Julia et Marie-Madeleine Compère. La démarche initiale est ici celle de la reconstitution d’une offre scolaire, celle des collèges d’humanités, qui sont à l’origine de l’enseignement secondaire.
Cette offre est particulièrement complexe : dépendant d’universités (ils sont nés dans le cadre de la faculté des Arts de Paris) ou de congrégations, souvent issus d’initiatives des autorités urbaines, ou soutenus par elles, les collèges se diffusent à travers l’Europe puis l’Amérique catholique (et dans les pays protestants, sous des formes voisines) à partir du XVIe siècle.
En reconstituant la carte virtuelle de ces établissements, leur apparition, leurs fondements institutionnels et financiers, leurs moments de croissance ou d’affaiblissement, leur concurrence, y compris la concurrence entre gros collèges urbains et petits établissements de proximité, ce recensement a offert à l’histoire de l’éducation un matériau d’une richesse extraordinaire, à partir duquel apparait, dans toute sa complexité, le rôle des établissements dans l’histoire scolaire.
Le deuxième chantier de cet ordre est celui que Jean-Pierre Briand et Jean-Michel Chapoulie ont mené à bien sur les écoles primaires supérieures de la Troisième République. Dans ce cas, on est en présence d’un réseau scolaire relevant d’une administration de l’Etat, en l’occurrence la direction de l’enseignement primaire du ministère de l’Instruction publique.
Pourtant, c’est, plus encore que dans le cas des collèges d’humanités, l’extraordinaire variété de ses établissements, des enseignements qu’ils offrent et des finalités auxquelles ils répondent qui frappent (de la formation de futurs instituteurs ou institutrices à celle d’employés, d’ouvriers, et même pour quelques-uns de futurs ingénieurs).
Ce qui frappe aussi, c’est la présence des municipalités dans cette histoire, celle des notables, des milieux professionnels, des agents territoriaux et locaux de l’institution scolaire (recteurs, inspecteurs d’académie, inspecteurs primaires, chefs d’établissements), celle des réseaux du primaire (écoles élémentaires, écoles normales), les relations conflictuelles avec l’administration de l’enseignement technique.
Ces deux chantiers initiaux ont eu un effet d’entrainement sur l’histoire de la scolarisation, en encourageant notamment à aller chercher dans les archives les traces de la réalité de l’offre scolaire au lieu de se contenter du regard d’en haut. J’ai eu la chance de participer, avec Gérard Bodé, à cette découverte concernant l’enseignement technique, à une époque (les années 1990) où, parce qu’il procédait d’en bas, d’initiatives locales bien souvent, et parce qu’il n’avait pas retenu l’attention des historiens au même titre que des enseignements plus prestigieux (le secondaire, le supérieur), ou plus universels (le primaire), on ne savait quasiment rien de l’histoire de cet enseignement, en dehors de quelques écoles exemplaires, et où les archives recelaient ni plus ni moins qu’un continent englouti. Depuis vingt ans des pans entiers de ce continent ont émergé, mais il reste encore beaucoup à découvrir.
A l’autre extrémité de l’offre scolaire à cet égard, l’enseignement secondaire contemporain (né de la loi de 1802 créant les lycées) est né et s’est développé sous la tutelle de l’État, et a servi d’avant-garde dans la construction de l’institution scolaire publique. J’ai pourtant appliqué dans une certaine mesure cette méthode de la monographie en série aux lycées et aux collèges communaux du XIXe siècle, et on peut trouver les principaux résultats de cette approche dans mon ouvrage récemment publié sur La construction de l’enseignement secondaire au XIXe siècle.
Ici, l’objectif ne consistait pas à retrouver des établissements disparus, même si la cartographie exhaustive des collèges communaux au XIXe présente quelques difficultés. Les lycées et les collèges du XIXe siècle sont répertoriés dans des annuaires et almanachs officiels, et ils ont fait l’objet de publications statistiques très détaillées, notamment pour les années 1865, 1876, 1887 et 1898.
Ma démarche a été de tenter de reconstruire l’histoire de l’enseignement secondaire en prenant pour point de vue central celui de l’établissement secondaire ; de son organisation scolaire héritée des collèges d’humanités, mais en tension et en évolution tout au long du siècle ; de son financement qui fait des familles les principales contributrices, du moins jusqu’en 1880 ; de la distribution des élèves entre boursiers et pensionnaires payants, demi-pensionnaires, externes encadrés en dehors des classes dans des pensions privées, externes libres, etc. ; de la composition du corps enseignant, des professeurs aux répétiteurs ; de sa gouvernance (pour employer un terme d’aujourd’hui qui convient assez au modèle de distribution de l’autorité propre aux lycées).
Ainsi, l’histoire que je me suis efforcé de produire est celle de l’évolution d’une forme d’établissement et d’enseignement , de sa naissance en 1802 à sa réinvention en 1902, non pas en faisant abstraction du rôle des autorités éducatives, mais en montrant combien leur action s’inscrit nécessairement dans le cadre fixé par le modèle économique, organisationnel et pédagogique que Bonaparte et Fourcroy ont choisi de ressusciter tout en l’adaptant.
Une histoire de la scolarisation et de l’enseignement qui prend en compte l’échelle de l’établissement n’est donc pas nécessairement une histoire construite à partir de sources purement locales et d’un point de vue uniquement local. C’est avant tout une histoire qui identifie l’établissement comme une échelle pertinente d’observation de l’enseignement, parce que c’est une échelle pertinente pour saisir la création de l’offre et de l’organisation scolaires et leur évolution.
Cela me conduit à la dernière partie de mon exposé, celle dans laquelle je vais poser, ou reposer mais avec l’intention d’y répondre un peu plus directement, la question de la contribution des établissements et du milieu local à l’évolution scolaire.
Première remarque, l’établissement scolaire est né avec ce qui deviendra trois siècles plus tard l’enseignement secondaire.
C’est la transformation, à l’époque de la Renaissance, des collèges de la faculté des arts de Paris, qui étaient des pensionnats abritant des élèves boursiers, en lieux d’enseignement (collèges d’exercice), puis l’organisation d’un enseignement adressé à des élèves grammairiens, plus jeunes, encadrés par ces boursiers ou des pensionnaires payants, qui créent ce nouveau découpage scolaire qui mène des rudiments de la grammaire latine à la philosophie.
Les collèges parisiens adoptent la division des élèves en classes selon leur niveau, et donc à la fois la notion de cursus scolaire formé de marches successives et la pédagogie simultanée. Ils constituent alors le prototype de l’établissement scolaire, qui n’est pas qu’une école, mais un lieu d’éducation complexe offrant, outre des cours organisés selon une progression donnée, une série de services annexes : logement, nourriture, surveillance, encadrement du travail entre les classes, pratique religieuse, etc.
Dominique Julia a montré comment ce modèle initial, repris par les Jésuites pour former leurs futurs membres puis pour assurer l’éducation des élites sociales afin de les maintenir dans le catholicisme, est amélioré grâce à la circulation de visiteurs qui ne font pas que veiller à ce que le modèle pédagogique romain soit respecté, mais s’inspirent aussi des innovations observées dans les collèges des provinces.
L’évolution des contenus et méthodes pédagogiques et des pratiques scolaires n’obéit pas qu’à ce modèle centralisé. Un moteur particulièrement efficace dans les temps anciens (avant la Deuxième Guerre mondiale, en France) où le problème des établissements, qu’ils soient publics ou privés, n’était pas de gérer des flux surabondants mais de recruter des élèves pour assurer leur viabilité, a été de diversifier leur offre, de saisir un marché potentiel, ou d’en disputer une part à la concurrence.
C’est selon cette logique que la création d’écoles de formation des corps savants militaires et civils de l’État au XVIIIe siècle, a entraîné celle d’écoles proposant de préparer les candidats aux épreuves d’admission.
L’École polytechnique, créée par la Révolution comme école fondamentale de ces corps savants, engendre tout un marché de la préparation, qui s’impose non seulement aux écoles privées mais surtout aux lycées eux-mêmes : le poids social de ce débouché explique la présence d’un enseignement des mathématiques dans les premiers lycées, et la persistance d’un enseignement scientifique dans le secondaire pendant tout le XIXe siècle, même quand les autorités y sont hostiles.
Un phénomène du même ordre a donné naissance au modèle français d’enseignement technique industriel, marqué par la présence d’ateliers de travail manuel dans les écoles, les écoles d’arts et métiers offrant des formations prometteuses et financées par des bourses départementales.
À côté de ces logiques de marché, d’autres mécanismes entrent en jeu dans l’évolution de l’offre scolaire au niveau de l’établissement scolaire. Un facteur majeur d’évolution est tout simplement l’usure de certaines pratiques et de certains exercices, leur inadaptation progressive aux populations scolarisées.
L’exemple du latin et du grec au XIXe siècle est particulièrement éclairant à cet égard. L’histoire éducative a gardé le souvenir de la polémique retentissante opposant en 1872 Mgr Dupanloup au ministre Jules Simon qui, pour se conformer à des recommandations inspirées de la défaite contre la Prusse, voulait réduire ou supprimer de l’emploi du temps des classes certains exercices latins et grecs qu’il jugeait dépassés, afin de faire de la place pour l’enseignement de l’histoire et de la gymnastique.
C’est un moment crucial, celui où l’enseignement catholique s’empare de l’étendard des études classiques maintenues dans toute leur pureté, contre l’enseignement public qui commence à moderniser les contenus (Ferry ira bien plus loin en 1880). Or, André Chervel a montré que ces fameux exercices auxquels Simon proposait de renoncer étaient déjà en voie de disparition dans la plupart des classes, les élèves n’étant plus en mesure de les affronter.
On avait déjà dû renoncer en catastrophe, à l’époque de la Restauration, au rétablissement du latin dans l’enseignement de la philosophie, pour des raisons analogues.
On voit ici que, la pratique du latin s’effondrant à grande vitesse et le niveau des élèves et des professeurs avec elle, ce sont les professeurs eux-mêmes qui en tirent les leçons en premier. C’est également dans le sein des lycées que la composition française colonise l’enseignement classique, avant tout changement de la réglementation, pour les mêmes raisons et en fonction de considérations pratiques, telles que la nécessité d’évaluer l’enseignement historique qui n’a pas su développer ses propres exercices.
L’établissement scolaire est le lieu où se rencontrent les élèves et les enseignants et sur lequel pèsent toutes les contraintes inhérentes à cette rencontre. Il est de ce fait un lieu privilégié d’observation de la réalité scolaire.
Mais cette observation ne peut se passer de contextualisation. Aucun dispositif éducatif n’existe en dehors de tout contexte social ou matériel. C’est la dure leçon à laquelle se sont heurtés les réformateurs les plus audacieux du système scolaire depuis que les ratés de la démocratisation se sont manifestés. Ainsi, les auteurs du rapport Joxe sur la condition enseignante, en 1972, et d’autres avant eux, et surtout après, qui ont suggéré une sorte une subversion des cadres disciplinaires, matériels et organisationnels (les matières, la classe, les services des enseignants) supposés enfermer élèves et professeurs dans la « crise de la relation pédagogique », cadres qui ont résisté jusqu’ici à toutes les mises en cause.
Bibliographie
Gérard Bodé, Philippe Savoie, L’offre locale d’enseignement. Les formations techniques et intermédiaires, numéro spécial de la revue Histoire de l’éducation, n° 66, mai 1995.
Jean-Pierre Briand et Jean-Michel Chapoulie, Les collèges du peuple. L’enseignement primaire supérieur et le développement de la scolarisation prolongée sous la Troisième République, Paris, INRP-CNRS-ENS Fontenay-Saint-Cloud, 1992.
Marie-Madeleine Compère, Du collège au lycée (1500-1850), Paris, Gallimard-Julliard, 1985.
Marie-Madeleine Compère et Philippe Savoie (dir.), L’établissement scolaire. Des collèges d’humanités à l’enseignement secondaire, XVIe-XXe siècles, numéro spécial de la revue Histoire de l’éducation, n° 90, mai 2001).
André Chervel, La culture scolaire. Une approche historique, Paris, Belin, 1998.
Dominique Julia, « Entre universel et local : le collège jésuite à l’époque moderne », PaedagogicaHistorica. International Journal of the History of Education, avril 2004, p. 15-31.
Dominique Julia, Marie-Madeleine Compère, Les collèges français, XVIe-XVIIIe siècle, Paris, INRP-CNRS, 3 vol. , 1984-1988-2002.
Philippe Savoie, « Éléments d’analyse historique de la littérature officielle sur les enseignants du secondaire », in Jean-Pierre Obin (dir.), Enseigner, un métier pour demain, Paris, La Documentation Française, 2003.
Philippe Savoie, La construction de l’enseignement secondaire, 1802-1914. Aux origines d’un service public, Lyon, ENS-éditions, 2013.