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Les Lieux d'Éducation Associés à l'IFÉ (léa-IFÉ)

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Rendez-vous des LéA - janvier 2022

Gérer la diversité des logiques des acteurs dans les LéA


Le mercredi 12 janvier 2022, nous nous sommes retrouvés pour le deuxième Rendez-vous des LéA de l’année. Ce Rendez-vous a été construit à partir des préoccupations exprimées par les acteurs du réseau des LéA et a eu pour thème : “Gérer la diversité des logiques des acteurs dans les LéA”. Cette rencontre a réuni près d’une cinquantaine de personnes : des correspondants LéA, des correspondants Recherche, des référents IFÉ, des membres du comité de pilotage et de l'équipe de coordination du réseau des LéA.


Un partage de points de vue de différents acteurs dans une recherche

 

En préambule aux échanges, nous avons visionné ensemble un extrait de la conférence d’Yves Reuter, Professeur émérite à l’université de Lille, “Des espaces de travail entre recherches et pratiques”, réalisée le 17 octobre 2018 lors d’un Séminaire de Rentrée des LéA. (voir la conférence)

Dans l’extrait choisi, Yves Reuter présente les points de vues des différents acteurs d’une recherche sur les impacts de la pédagogie Freinet en milieu défavorisé. Cette recherche visant à comprendre les pratiques et leurs effets sans les modifier, a nécessité de ne pas faire de retour aux enseignants et de ne pas publier de résultats durant deux ans. Les acteurs concernés sont les enseignants, l’IEN, les autorités académiques, les chercheurs, les syndicats, les parents, … Leurs attentes sont différentes et engagent des enjeux forts de compréhension et d’articulation pour tous et en particulier pour celui qui anime le groupe de recherche. 

Tout comme l’exemple présenté par Yves Reuter, les Lieux d'éducation Associés sont constitués d’acteurs avec une multiplicité de logiques, il faut le savoir et réussir à les dépasser.


Comment gérer les logiques des différents acteurs dans les LéA ?


Différents membres de LéA présents au Rendez-vous ont partagé des expériences vécues dans leur projet et des outils qui leur permettent de prendre en compte cette diversité.

Des outils : points d’appui pour gérer des  logiques diverses.


Stéphanie Clerc Conan et Estelle Moumin, correspondantes LéA et Recherche du LéA écoles maternelles REP+ des Hautes Ourmes, Rennes, nous ont présenté les outils mobilisés dans leur LéA pour apprendre à se connaître et à découvrir les modalités de travail de chacun : le carnet de recherche (à tenir régulièrement à jour, un appui pour aider l’autre, un outil pour garder du lien), la biographie langagière (sollicite la réflexivité des enseignants, un lien entre leurs pratiques et le projet), les rencontres enregistrées et retranscrites (permet une écoute différée, des moments sont sélectionnés pour être approfondis lors des temps de rencontre), les vidéos de classe envoyées par l’enseignant (analyse des vidéos par la chercheuse et sélection de passage à visionner en auto-confrontation). Le travail réflexif induit par ces outils contribuent à mieux comprendre les enjeux de chacun.

Nadège Saliot, correspondante LéA du LéA Circonscription ASH, ajoute que le compte-rendu est un outil pour exposer les logiques de fonctionnement de chacun. Il permet de faire émerger les questionnements, de repérer les remarques du terrain et la manière dont les données sont analysées par les enseignants-chercheurs. Il aide à cadrer les temps de rencontre dans leur LéA en prenant en compte les logiques et les compétences de chacun. Ces temps sont devenus ainsi des moments d’échange et de soutien. Les messageries instantanées sont aussi des outils qui permettent de maintenir le lien dans une forme d’horizontalité des relations. 

Dans le LéA Réseau Ecoles Armorique Méditerranée, Mireille Morellato (correspondante LéA) a présenté l’outil Vialogues (https://www.vialogues.com/) utilisé dans leur LéA pour converser de manière collaborative autour d’une vidéo. Leur recherche porte sur la compréhension et l’efficacité des pratiques d'enseignement. Cet outil leur permet de filmer des séquences et de les commenter. Les logiques de chacun apparaissent à travers les commentaires qu’ils font sur les séquences filmées. 

Ces partages d'expériences confirment qu’il est essentiel et incontournable d’expliciter les logiques des différents acteurs dans un travail de recherche collaborative et de mettre en place des modalités et des outils pour y parvenir. Différents paliers sont souvent nécessaires : prendre conscience de la diversité des logiques, comprendre les logiques des autres et se les approprier.  

Comment éviter les blocages ? S’adapter ? Déstabiliser ?


Caroline Hache, correspondante Recherche du
LéA Réseau CAPture en lycées professionnels, Aix-Marseille, pose la question des points de vigilance à prendre en compte et des moments où il est possible de les aborder pour éviter les blocages.  Elle souligne à titre d’exemple, les modalités à penser pour communiquer aux enseignants sur les données recueillies.

Christine Ducamp, correspondante Recherche du LéA Handi@cces Scolagri, explique que les analyses de séances filmées associant enseignants et chercheurs permettent de faire des allers-retours entre les concepts de la recherche et les pratiques enseignantes.

Laurent Reynaud, correspondant LéA du LéA classes coopératives lycée Feyder, fait part des difficultés qu’il a eu, lors d’une relecture d’article scientifique, à comprendre la logique d’un chercheur. Il interroge l’idée selon laquelle il faudrait à tout prix comprendre et faire sienne la logique de l’autre. Il parle de "déstabiliser la logique de l’autre avec bienveillance”.   Il observe également que l’effort d’adaptation entre différents acteurs (chercheurs-enseignants) est très important lorsqu’il s’agit d’acteurs issus de mondes très différents (e.g. acteurs éducatifs et chercheurs). L’un et l’autre sont attentifs à expliciter leurs attentes ou le vocabulaire employé. A contrario, les efforts d’adaptation sont souvent moins importants dans une communauté d’enseignants qui croient très bien se connaître. On peut, par exemple entre enseignants de disciplines différentes, se trouver dans un enfermement didactique qui va brider la parole. Comment prendre le temps de la réflexion sans paralyser les collègues et qu’ils puissent s’exprimer pleinement ?

Martine Gadille, correspondante Recherche du LéA Collège de Fontreyne, explique qu’en sciences de gestion, des recherches montrent que les publications innovantes sont celles où il y a le plus de conflits : des conflits débattus, négociés, résolus d’une façon ou d’une autre. Les conflits sont révélateurs de transformation de logique. Pendant la durée d’un LéA, les logiques peuvent évoluer. Les acteurs se saisissent d'opportunités dans leur environnement qui n’est pas immuable. 

Souder le collectif, ce n'est peut-être pas chercher à lisser, ou éviter, les conflits mais davantage à les accueillir pour qu’ils soient moteurs d'avancée collective. Ce n'est pas si facile au quotidien car on cherche souvent à ne pas brusquer, d'autant plus qu'il y a une asymétrie dans les rapports notamment enseignants/chercheurs. Les collègues enseignants sont souvent impressionnés.

Différents types de recherche, différents fonctionnements


Martine Gadille revient sur le type de recherche présentée par Yves Reuter. L’exemple provient d’une recherche intervention, pour laquelle il a fallu deux ans avant de publier, avant de faire un retour aux acteurs. Le schéma méthodologique est différent de celui des recherches collaboratives ou des recherches-action participatives. Dans ces dernières, la temporalité n’est pas la même, au niveau des boucles rétroactives dans la transformation des connaissances entre chercheurs et acteurs du terrain. 

Comment articuler les logiques des LéA et la logique institutionnelle ?


Stéphanie Clerc explique que le
LéA écoles maternelles REP+ des Hautes Ourmes, Rennes, travaille autour du développement des compétences en français. Le cadre théorique du chercheur est différent de la logique institutionnelle et du répertoire didactique des enseignants. Il arrive donc qu’il y ait parfois une confrontation entre ces deux cadres et que cela peut créer des freins dans la mise en place d'un projet. 

Brigitte Darchy-Koechlin (chargée de mission au BIP à la DGESCO), et Sabine Kitten, IA-IPR et CARDIE de l’académie de Créteil, expliquent l’intérêt de  la collaboration avec la CARDIE qui est un espace de dialogue privilégié entre l’institution et ce type de projet,  elle peut aider à fluidifier et à accepter d’aller dans une direction différente dans la mesure où cela fait partie d’un protocole de recherche. Michèle Prieur, coordinatrice scientifique du réseau des LéA, rappelle qu’il existe un décret national donnant droit à l’expérimentation et à l’innovation pédagogique qui légitime les recherches conduites dans les LéA.

La co-écriture d’articles 


La question des logiques des acteurs a orienté les discussions sur les reconnaissances des acteurs, notamment dans les activités de productions.

Comment co-écrire ? Quelle organisation ? 

Dans le LéA Réseau Ecoles Armorique Méditerranée, l’écriture d’un article part d’une expérience, d’un moment fort qui est source d’échange, de discussions. Les commentaires de séquences filmées servent de base pour l’article. Il est ensuite commenté. L’écriture commence par une description, puis affinée par les commentaires pour enfin être ré-écrite. 

Delphine Morand, correspondante LéA du LéA Jules Ferry, explique que la co-écriture avec le chercheur a débuté pendant le premier confinement. Le plan est écrit conjointement, le contenu complété, modifié et relu successivement par l’un et par l’autre sur un document collaboratif.

Où publier des articles co-écrits ? 

Il est important de réfléchir à la revue dans laquelle le collectif souhaite publier, d’avoir eu une analyse en amont du support suivant la publication et de l’utiliser stratégiquement.

Les revues d’interfaces peuvent être un point de départ intéressant pour co-écrire, elles demandent moins d’exigences académiques et sont reconnues par les communautés scientifiques et éducatives

Les chapitres d‘ouvrage sont aussi des espaces intermédiaires intéressants dans la co-production, les contraintes sont différentes que dans une revue théorique ou académique.

Quelques exemples de revues interface :

Education et didactique - revue professionnelle
Cette revue accueille régulièrement des articles de LéA, co-construits avec le réseau des LéA. Cinq articles co-écrits par des LéA vont paraître au premier trimestre de janvier 2022.

DIVERSITÉ - revue d’interface de l’IFÉ-ENS de Lyon

Le français aujourd'hui - revue d’interface liée à l’Association française pour l'enseignement du français (AFEF)

Les cahiers de l’Acedle - revue qui diffuse des recherches théoriques, praxéologiques et/ou interdisciplinaires relatives à la didactique des langues et des cultures. Elle a consacré un numéro aux recherches collaboratives.

Revue hybride de l'Université du Québec à Chicoutimi - revue d’interface où l’on retrouve des articles sur les recherches collaboratives.


Conclusion du Rendez-vous

 
Aurore Promonet, Maître de Conférences, INSPÉ Nancy-Metz, Université de Lorraine, membre du COPiL et du comité scientifique des LéA, correspondante Recherche, a conclu ce deuxième Rendez-vous des LéA.

De qui était-il question dans nos échanges ? D’enseignants, de chercheurs, dans une logique parfois de confrontation. De parents, de professionnels partenaires plus ou moins extérieurs, souvent évoqués. 

Tous avec une préoccupation commune : se connaître pour éviter le conflit et le blocage et se comprendre pour avancer ensemble. Se connaître pour travailler ensemble. On croit savoir ce que les autres font sans parler de notre propre logique et il semblerait que cette ignorance soit première. Elle est apparue surtout dans des LéA en début de cursus. Perçue en filigrane dans les discussions, la question de la rencontre de l’autre, de la compréhension de l'autre, se pose de différentes manières suivant la durée de vie du projet. 

Des logiques sont mises en confrontation, comment cherche-t-on des solutions ?
Pour y répondre, le champ lexical du déplacement a été utilisé de nombreuses fois avec cette idée de tuilage. On a la possibilité de gommer sa particularité, de s’effacerse retenir, de ne pas parler de son contexte disciplinaire par exemple. Ou bien l’on déstabilise l’autre au lieu de se forcer à l’accueillir, on le pousse un peu pour mieux comprendre ces logiques. On se “lance” dans les thèses, ce qui montre l’énergie mise en œuvre. 

Pour faire du commun, il faut de la confrontation. On cherche le commun et ce commun passe par des captations. Des captations vidéo, mais aussi des captations du commun : quel est la logique de l’autre ? 

Finalement, est-ce une logique ou est-ce une expérience ? On perçoit des logiques différentes mais ce sont peut-être des expériences différentes. 

Dans la recherche du commun, comprendre l’autre pour faire sienne. Produire des connaissances communes, apprendre ensemble. On se reconnaît, on tisse des liens. 

Dans cette reconnaissance, on arrive à une dynamique itérative. On met en place des outils qui ont tous un lien avec les activités langagières : le carnet, la biographie langagière, la transcription des rencontres, les compte-rendus, les captations, les documents collaboratifs pour la co-écriture. Tous ces outils ont en commun cette idée de captation pour y revenir, d’itération.

Le tissage : les rencontres sont enregistrées pour être transcrites et devenir un texte, une trame commune. 

Un fonctionnement itératif : Il existe, a priori, une opposition entre des individus, mais aussi des collectifs, chacun représentant sa classe, sa catégorie, sa discipline. On le sent comme une opposition, voire une différence, plus en début de LéA qu’au fil du temps. 

Dans la recherche du commun : On produit des connaissances, on apprend à connaître l’autre, on tisse des liens, on essaie de comprendre la logique et la structure du commun.

Ces oppositions deviennent complémentarité entre les catégories d’acteurs et chacun oublie l’anecdotique de sa classe et entre dans du discours pour être partagé. Cela nécessite du temps et la recherche d’espace. 

Du temps : le temps de durée de vie d’un LéA.

De l’espace : de l’espace pour communiquer, pour publier. Le Rendez-vous des LéA s'est affirmé comme un espace de dialogue, de rencontre, de tissage. 

Avec la nécessité absolue, comme le souligne Yves Reuter, de la négociation pour faciliter le travail de chacun et tous ensemble.
« On se rencontre, on transcrit, on écrit, on en discute jusqu’au prochain rendez-vous du réseau des LéA »

Compte-rendu à télécharger  

Ressources : 

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