Mes recherches portent sur la progressive mise en place d’une éducation des citoyen.ne.s depuis la Révolution française, notamment par l’analyse du catéchisme politique. Cette littérature de vulgarisation politique s’inscrit dans un long XIXe siècle (1789-1914) marqué par une forte production catéchistique, certes non-linéaire et étroitement liée au contexte politico-pédagogique. Cette étude a été menée sous l’angle de la pédagogie politique, conçue comme une interaction entre un projet politique et la mobilisation d’outils pédagogiques considérés comme propices à la réussite de ce projet. À ce titre, la diffusion de ces petits manuels élémentaires s’insère dans le temps long de l’élémentation des savoirs et pratiques associés à l’éducation politique en France. L’étude de ces ouvrages m’a permis de faire une "pré-histoire" de l’éducation à la citoyenneté en France en insistant sur les transferts pédagogiques entre sphère scolaire et sphère politique.

En tant que collaborateur scientifique à l’Université de Genève, j’ai poursuivi cette approche historique de l’éducation politique par l’étude des apports de la pédagogie libertaire à l’école de la Troisième République en suivant le parcours de James Guillaume. Cet intellectuel suisse fit le lien entre les internationalistes (il était proche de Bakounine en Suisse) et les républicains qui furent à l’origine de la politique scolaire des années 1880 (par son amitié avec Buisson qui le fit venir à Paris en 1878). Il fut aussi lié aux militant.e.s syndicalistes de tendance anarchiste par son influence au sein des publications dirigées par Monatte dans les années 1910. De plus, par sa correspondance avec ses ami.e.s resté.e.s en Suisse, James Guillaume a été un véritable passeur d’idées politiques, un traducteur prolifique de textes étrangers. Son rôle éclaire les échanges qui se font au gré des réseaux de correspondant.e.s et de militant.e.s.