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Démarche d’enseignement 2017-11-25T11:08:18+02:00

Pourquoi enseigner la géographie par la démarche prospective territoriale ?

Une quarantaine de professeurs de l’Académie de Lille ont expérimenté à des niveaux différents d’enseignement, du collège et des lycées, des dispositifs pédagogiques introduisant la démarche prospective dans leur enseignement de la géographie. L’action s’est construite dans un partenariat avec le Commissariat Général à l’Egalité des Territoires et avec la Région Hauts-de-France Nord Pas de Calais – Picardie.

Ils ont été accompagnés par des chercheurs, des universitaires, au premier rang desquels figure leur correspondant IFE, le géographe Michel Lussault, et les didacticiennes de l’ESPE Lille-Nord de France, Nicole Tutiaux-Guillon et Sylvie Considère.

Les témoignages des enseignants permettent de saisir en quoi la démarche prospective a permis de renouveler leur manière d’enseigner la géographie. Ces propos font échos à ceux de Nathalie Malabre (Inspectrice Académique -IPR) et Cyrille Larat (Inspecteur Education Nationale), qui ont impulsé dans leur académie ce mouvement afin de développer une approche dynamique de la géographie.

Le géographe Jean-François Themines souligne ainsi « le potentiel didactique de l’étude d’un territoire conduit le cours de géographie sur le terrain du monde, plutôt que, comme d’ordinaire, ce soit le monde qui entre dans la classe. […] Les élèves sont placés en situation d’auteurs. Au-delà de savoir disciplinaires […], c’est ainsi l’unité de l’élève qui peut être visée : sa capacité à exprimer un avis, un jugement argumenté, une solution raisonnée, sa vision d’un problème ; sa capacité à le faire avec son propre style ; en somme une préparation effective à ses futures interventions de citoyen. » (Savoir et savoir enseigner le territoire, 2011)

Entretiens avec

En collège et lycée général et technologique

Natalie Malabre, IA-IPR en histoire-géographie, académie de Lille

Pourquoi avoir introduit la démarche prospective dans l’enseignement de la géographie ?

Nous sommes partis d’un constat : on enseigne trop souvent encore une géographie descriptive qui ne prend pas suffisamment en compte les dynamiques spatiales pour aider les élèves à avoir une compréhension d’un monde complexe en mouvement. Il est difficile pour les élèves de s’approprier les connaissances attendues de façon durable, de comprendre certaines notions essentielles comme la production des espaces par des acteurs géographiques ou de mettre en œuvre un raisonnement géographique.

Le projet entend répondre à deux types d’enjeux :

  • un enjeu pédagogique : construire les compétences et les connaissances des élèves en mettant en œuvre une pédagogie active qui autorise les élèves à devenir acteurs de leurs apprentissages et auteurs de leurs savoirs. Laisser une place à la pédagogie de projet pour donner du sens aux apprentissages.
  • un enjeu éducatif : éduquer des habitants conscients de leurs territoires et en capacité d’analyser leurs pratiques spatiales et de les faire évoluer, donc développer les compétences géographiques des élèves. On remarque aussi dans l’Académie de Lille que les faibles mobilités des élèves de certaines catégories sociales et leur difficulté à se projeter dans l’avenir entravent leur réussite scolaire. Le territoire académique se caractérise par ailleurs, particulièrement dans le département du Nord, par de très fortes inégalités qui obligent à repenser comment ménager la cohabitation.

Quels sont les objets d’étude ? Quelle est la démarche ?

La quarantaine d’enseignants impliqués dans le projet académique ont commencé par travailler à l’échelle locale, sur les territoires de proximité des élèves, qu’il s’agisse d’espaces vécus ou d’espaces encore jamais pratiqués par les élèves mais dans leur environnement local ou régional. Dans les démarches conduites, nos partenaires du CGET ont systématiquement identifié un exercice de compréhension qui constituait un diagnostic territorial permettant de définir une situation problématisée. L’enquête de territoire a permis de réinterroger la sortie de terrain, la rencontre avec les habitants et les acteurs géographiques, l’utilisation des documents géographiques, les outils mobilisés pour mener l’enquête ou en rendre compte. L’exercice de prospective doit répondre à un enjeu spatial identifié : comment améliorer les mobilités ? Comment enrayer le déclin d’une ville moyenne mal connectée ? Comment dynamiser un espace en déclin de la métropole ? Comment limiter l’étalement urbain ou mettre plus d’urbanité dans un espace périurbain ? Comment aménager une friche en ménageant la cohabitation ? Les exercices de prospective ne sont pas toujours aboutis et ne proposent pas toujours un réagencement socio-spatial. Mais les processus territoriaux et les dynamiques territoriales à l’œuvre sont beaucoup mieux compris des élèves.

Les enseignants ont ensuite investi des espaces plus éloignés qui ne pouvaient pas être pratiqués concrètement par les élèves. L’idée était de voir si un exercice de prospective était possible à partir d’espaces de l’ailleurs et de travailler parfois à des échelles différentes de l’échelle locale, l’hypothèse étant que l’exercice de prospective pouvait permettre aux élèves de s’approprier les problématiques spécifiques de ces espaces et de mieux comprendre les dynamiques territoriales à l’œuvre.

Des projets ont été conduits de la Sixième aux classes de Terminales des Lycées professionnels, avec une progressivité des apprentissages et des attendus. Les élèves les plus jeunes entrent très facilement dans la démarche et mobilisent des imaginaires géographiques, de façon parfois très intuitive. Ils ne s’embarrassent pas des possibles ou des probables mais développent des argumentations très construites pour défendre leurs projets. Plus on avance dans la scolarité, mieux les contraintes sont intégrées, les élèves des lycées généraux et technologiques ne s’autorisant pas toujours des ruptures radicales par rapport à l’ordre du réel. L’accompagnement de l’enseignant est ici décisif pour libérer la créativité des élèves.

L’absence de cadrage des choix et des méthodologies mises en œuvre en collège et en LGT a été volontaire. Il s’agissait d’observer tous les possibles de l’exercice pour dégager ensuite des invariants. La seule contrainte posée a été d’investir les programmes officiels et de pratiquer l’exercice dans l’ordinaire de la classe.

Les quelques expériences présentées ici témoignent de la diversité des objets, des approches, des scénarios pédagogiques. Il n’existe pas un modèle de leçon de prospective, mais autant d’expériences que d’enseignants.

Les enseignants témoignent

Témoignage de Gabriel Kleszewski (2min42), enseignant en histoire et géographie (collège Jean Rostand – Sains-en-Gohelle)

Témoignage de Laura Carbonnier (2min51), enseignante en histoire et géographie (lycée Beaupré – Haubourdin).

Sabine Dumont (4min50), enseignante en lettres, histoire et géographie (lycée hôtelier Michel Servet – Lille)

Rachid Sadaoui (4min34), enseignant en histoire-géographie (collège Lucie Aubrac – Tourcoing)

En lycées professionnels

Interview de Cyrille Larat (bientôt en ligne)

Parole de formatrices

Deux formatrices, Elisabeth Lignier et Emilie Dhénin, évoquent l’introduction de la démarche prospective en géographie. Elles reviennent sur la formation à cette démarche et comment celle-ci a fait évolué leur approche de l’enseignement de la géographie.