[Article] Aux origines de la professionnalisation ? La Genèse du corps enseignant secondaire français
p.13-26


Le succès de la notion de professionnalisation, appliquée à l’éducation par diverses branches des sciences sociales, ne va pas sans ambiguïtés. Pour les historiens, le terme désigne le mouvement de sécularisation et de spécialisation qui a conduit à l’émergence d’une fonction enseignante à plein-temps au sein du clergé puis à son épanouissement en dehors de celui-ci. Depuis une vingtaine d’années, il renvoie au cadre conceptuel de la sociologie américaine des professions : la professionnalisation suppose la pratique du métier à plein-temps, un statut légal reconnaissant la qualification de ses membres, une formation spécifique et l’existence d’associations professionnelles. Cette professionnalisation se traduit par la constitution d’un patrimoine cognitif et déontologique commun. L’article propose une mise en perspective critique de cette notion à géométrie variable à travers la singulière genèse du corps enseignant secondaire français qui a marqué la configuration de ce corps, les conditions d’exercice du métier et la conscience collective des enseignants.


While the notion of professionalisation applied to education by several branches of social sciences is very popular, it remains ambiguous. For historians, it refers to the movement of secularisation and specialisation that led to the full-time teaching profession within the clergy and to its emancipation from it afterwards. For American sociologists of professions, professionalisation implies full-time teaching, a legal status recognising the qualification of its members, specific training, and active professional associations. This professionalisation contributes to building common cognitive and deontological heritage. The paper puts this varying notion in critical perspective and examines how the French body of secondary teachers was born, their teaching conditions and their collective consciousness.