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Rythmes scolaires : pour une dynamique nouvelle des temps éducatifs


n° 60, février 2011   

 

Auteur(s) :  Agnès Cavet

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Résumé : 
La question des rythmes scolaires apparaît comme un « vieux dossier » toujours d'actualité, dont les enjeux et implications dépassent largement le strict cadre de l'institution scolaire. L'école a connu depuis 30 ans diverses réformes visant à « aménager » les rythmes scolaires pour améliorer les conditions de vie et d'apprentissage des élèves. Tel est encore l'objet de la Conférence nationale ouverte au débat public en septembre 2010.

Quels sont les résultats récents de la recherche en éducation qui peuvent aider à renouveler la réflexion ? Quels sont les modèles alternatifs qui se développent aujourd'hui en Europe et en Amérique du Nord, en matière d'organisation du temps scolaire et de synergie des différents temps des enfants ? Quels enseignements peut-on tirer des travaux de recherche qui évaluent ces expériences ? Telles sont les questions développées dans ce Dossier d'actualité.

Quel « temps » fait-il à l'école ? La rythmique élémentaire de « l'heure de cours » reste encore aujourd'hui le principe organisateur de la vie pédagogique, qui est découpée entre les grilles de l'emploi du temps, selon l'équation « une heure - un enseignant - une discipline - un cours - une classe ». Centrée sur les enseignants et non sur des élèves, cette organisation du temps pédagogique n'apparaît plus adaptée aux besoins actuels de transversalité des enseignements et d'individualisation des apprentissages.

Des expériences menées en France, en Suède et aux Pays-Bas montrent pourtant qu'il est possible de repenser l'emploi et l'usage du temps pour que le temps devienne véritablement une « ressource » mise au service de la pédagogie. Ces expériences d'emploi du temps « mobile », « variable » ou « flexible » reposent sur un important travail en équipes de la part des enseignants, dont les pratiques professionnelles se trouvent transformées et enrichies. Ces dispositifs obtiennent des résultats très positifs en termes d'ouverture, d'autonomie des élèves, de stratégies d'apprentissage, de compétences sociales... Elles influencent la motivation non seulement des élèves mais aussi des enseignants et se prêtent bien à la mise en oeuvre de pédagogies plus actives.

Aux portes de l'école, le « temps libre » exerce une forte concurrence sur le temps scolaire. L'école n'est plus le seul lieu ni le seul temps qui permette aux enfants et aux adolescents d'acquérir des savoirs, de construire des compétences, de se socialiser et de s'ouvrir sur le monde. Les médias, les bibliothèques, l'Internet, les activités de loisir et de culture, les échanges avec la famille, les amis et l'environnement sont autant d'occasions de développement personnel, d'expériences et d'acquisitions différentes de celles de l'école, complémentaires ou non mais tout aussi importantes.

Pour sortir de cette concurrence et permettre au contraire une concordance des temps éducatifs de l'enfant, se développent dans dans différents pays voisins comme l'Allemagne, la Suisse et le Royaume-Uni des dispositifs d'« école à temps plein », d'« école à journée continue », d'« école étendue » qui ont en commun de fédérer sur le site de l'école une offre d'activités diverses, libres ou dirigées : aide aux devoirs, ateliers, pratiques sportives et artistiques, bénévolat... Les écoles primaires, collèges et lycées sont alors ouverts tous les jours sur une large plage horaire, parfois aussi pendant les vacances. Ces dispositifs reposent sur une collaboration de l'école avec d'autres acteurs locaux. L'école se redéfinit comme un lieu de vie ouvert et fédérateur. Les évaluations de ces dispositifs rendent compte d'effets positifs sur les compétences sociales des élèves et la qualité des relations qu'ils développent avec les adultes.

Toutes ces expérimentations ont un point en commun : la disparition des devoirs à la maison, puisque le travail personnel des élèves est réalisé à l'école.

Telle qu'elle est trop souvent posée, la question des rythmes scolaires renvoie à des modalités d'allocation du temps (combien, à quelle fréquence et pour quelle durée ?), autrement dit à une sorte de « posologie » du temps scolaire qui serait administré aux élèves pour faire passer l'enseignement. Cette approche confère donc un pouvoir supposé à des paramètres quantitatifs qui tendent à ne reconnaître au temps qu'une valeur de « ressource provisionnelle » qu'il convient d'affecter judicieusement pour en retirer les profits.

Fort heureusement, l'action du temps sur l'enseignement ne se réduit pas à sa quantité : la « qualité » du temps passé ensemble, élèves et enseignants, semble avoir un impact beaucoup plus important sur la motivation des élèves et sur la réussite scolaire. Travailler à donner de la qualité au temps de l'enseignement, tel est le projet qui pourrait réunir tous les acteurs de l'éducation.


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et L'essentiel




Abstract : 
The organization of school time seems like an old issue that is always topical, the stakes and implications of which go far beyond the strict framework of the educational institution. Over the last 30 years, school in France has undergone various reforms aiming at “adjusting” the school calendar and time schedule to improve pupils' learning and living conditions. This is still the purpose of the National conference opened to public debate in September 2010.

What are the recent results of educational research that may help to encourage new thinking on the subject? What are the alternative models which are being developed today in Europe and North America, as regards the organization of school time and as regards the synergy between the educational activities proposed to children both at school and after school? What lessons can we learn from the work which is evaluating these experiences? Such are the questions discussed in this Dossier d'actualité.

In France as in many countries, the elementary rhythm of “the lesson”, which lasts about one hour, is still today the organizing principle of life at school which, in secondary education, is broken up between the time slots in the timetable, according to the equation “one hour - one teacher - one discipline - one lesson - one class”. This teacher-centred and not pupil-centred way of organizing teaching time no longer appears suited to the present needs for a transverse and individualized approach to learning.

Experiments carried out in France, Sweden and the Netherlands show, however, that it is possible to reconsider how time is used so that it becomes truly a “resource” at the service of education. These experiments with a “mobile”, “variable” or “flexible” time schedule are based on significant team work by teachers, whose professional practices are transformed and enriched. These measures obtain very positive results in terms of pupils' open-mindedness and independence, learning strategies, social skills , etc. They influence the motivation not only of the pupils but also of the tachers and lend themselves well to the use of more active teaching approaches.

At the school gates, “free time” is in strong competition with school time. School is no longer the only place nor the only time which allows children and teenagers to acquire knowledge, to build competencies, to socialize and to open up to the world. The media, libraries, the Internet, leisure and culture activities, exchanges with the family, friends and the environment all provide occasions for personal development, experiences and acquisitions that are different from those of the school; whether these are complementary or not, they are quite as important.

To get away from this competition and to make way for compatibility of educational time for children, in various neighbouring countries such as Germany, Switzerland and the United Kingdom, measures such as “full-time school”, “all-day school”, “full-service schooling” and “extended school” are developing, which have in common that they associate an offer of varied, free or directed activities on the school premises: homework assistance, workshops, sports and artistic activities, voluntary help, etc. Primary and secondary schools are open every day for an extended period of time, sometimes also during the holidays. These measures are based on the school's collaborating with other local institutions. School is redefined as a living arena that is both open and encourages unity. Evaluations of these measures give an account of their positive effects on pupils' social skills and the quality of the relations which they develop with adults. All these experiments have a common denominator: the disappearance of homework, since pupils' personal work is done at school.

As it is too often posed, the question of the organization of school time refers to methods of time allocation (how much, how often and for how long?), in other words to a kind of “dose” of school time which is administered to pupils to help them swallow the educational pill. This approach confers supposed power on quantitative parameters which tend to recognize time as having value merely as a “provisional resource” that it is advisable to assign judiciously in order to derive benefit from.

Fortunately, the action of time on teaching cannot be reduced to its quantity: the “quality” of time that pupils and teachers spend together seems to have a much greater impact on pupils' motivation and academic success. Working to give quality to educational time: this is the project which could bring together all those involved in education.


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